Le 22 mai, le Bitcoin a percé de manière convaincante le niveau des 111 888 $, établissant un nouveau record historique à 111 867 $. Contrairement aux précédentes vagues marquées par l'euphorie des investisseurs particuliers, cette fois-ci, le comportement du marché est différent.
Les participants parlent de plus en plus non pas d'une frénésie spéculative, mais d'un changement fondamental de la perception du Bitcoin dans le monde financier. Ce n'est plus simplement un actif en hausse — il devient un prétendant à un rôle systémique dans l'économie mondiale.
Les investisseurs institutionnels alimentent le rallye actuel
Les bourses d'options, les ETF, les entreprises publiques et même les banques d'État dirigent ensemble leurs capitaux vers le Bitcoin. Quelle est la raison de cette tendance et quelles sont ses limites ?
Marché des options : un miroir des attentes de Wall Street
Un énorme engouement a été enregistré sur Deribit, le marché des options : l'intérêt ouvert pour les options BTC a atteint un record de 42,5 milliards de dollars. Le PDG de Deribit, Luuk Strijers, a ouvertement déclaré qu'il s'agissait du résultat de l'arrivée de "vrais capitaux" provenant de grands acteurs pariant sur une croissance continue.
Les contrats les plus activement négociés concernent des strikes à 110 000 $, 120 000 $ et même 300 000 $ expirant fin juin. En d'autres termes, les professionnels ne croient pas seulement à la tendance actuelle — ils parient qu'elle durera jusqu'à la mi-été.
Il ne s'agit pas de spéculation sur un marché peu liquide ; la situation sur Deribit reflète une réelle confiance dans l'avenir du Bitcoin de la part des acteurs qui investissent des milliards de dollars.
ETF : une révolution financière en action
Plus important que le sentiment des investisseurs, c'est l'infrastructure canalisant les capitaux vers la crypto — et rien n'illustre cela mieux que les ETFs Bitcoin au comptant. Le 21 mai seulement, les ETFs Bitcoin américains ont enregistré des apports nets de 607 millions de dollars, dont 530 millions ont été investis dans l'iShares Bitcoin Trust de BlackRock. Au cours des 11 derniers jours : 2,7 milliards de dollars. Depuis le début de l'année : plus de 42 milliards de dollars.
ETF Store et Bloomberg rapportent que 26 des 27 derniers jours de bourse ont vu des apports nets positifs. Même les ETFs or n'ont pas connu un tel élan durant leurs années fastes. Le marché ne fait pas que réagir — il est en train d'être remodelé.
L'IBIT de BlackRock détient désormais 636 120 BTC — plus que tous ses concurrents réunis. Ses investisseurs incluent des fonds spéculatifs, des fonds de pension, des fonds souverains (comme Mubadala), et des entreprises. Une nouvelle dimension émerge : Bitcoin n'est plus juste un actif — il devient une composante centrale des portefeuilles institutionnels avec un accès direct à travers des structures familières.
Les entreprises rejoignent la partie : des bilans qui brillent avec de l'or numérique
Les entreprises publiques s'impliquent de plus en plus. Strategy et Metaplanet ont déjà investi près d'un milliard de dollars. Twenty One Capital entre en bourse via un accord avec Cantor Fitzgerald et détient 42 000 BTC à son bilan. Strive Asset Management et Asset Entities créent la première entité publique gérée par des réserves de Bitcoin avec un horizon d'investissement allant jusqu'à un milliard de dollars.
Même des banques d'État (comme Bpifrance en France) et des entreprises de l'Inde, du Brésil et d'Indonésie participent. Leur motivation est claire : protection des actifs, croissance de la valeur, et indépendance face aux monnaies nationales sujettes à l'inflation.
Macroéconomie : une tempête qui gonfle les voiles de Bitcoin
Les marchés traditionnels ajoutent du carburant au feu de Bitcoin. Les rendements sur les obligations japonaises à 30 ans battent des records à 3,14 %, mais la demande disparaît. Les investisseurs japonais — traditionnellement de grands détenteurs de la dette américaine — pourraient bientôt commencer des ventes massives, exerçant une pression sur les bons du Trésor et approfondissant les problèmes de liquidité en dollars.
En même temps, l'indice du dollar américain chute, et les données de la CFTC montrent des positions courtes record contre lui. C'est fondamental : les investisseurs fuient les dollars pour des actifs réels. Pendant ce temps, l'offre mondiale de monnaie M2 à travers les États-Unis, l'UE, la Chine et le Japon augmente pour le deuxième trimestre consécutif. Historiquement, cela est corrélé avec les rallyes de Bitcoin avec un décalage de 2 à 3 mois.
Le Bitcoin est de plus en plus perçu comme un nouvel actif refuge. Dans un monde où les obligations ne rapportent plus et où le dollar manque de résilience, cette cryptomonnaie à offre limitée émerge comme la nouvelle "mine d'or numérique".
Les investisseurs particuliers manquent le coche ? Bon présage !
Santiment rapporte que malgré le rallye, l'activité sociale liée au Bitcoin reste à des niveaux de "marché baissier". Les requêtes de recherche et les discussions sur les réseaux sociaux sont minimales. Paradoxalement, cela accompagne souvent des tendances haussières soutenues — les spéculateurs restent sur la touche tandis que les grands acteurs accumulent tranquillement.
Les données de Binance corroborent cela. Selon CryptoQuant, le ratio spot-à-futures est tombé à 4,9 — le plus bas depuis 18 mois. Cela indique que les traders se concentrent davantage sur la spéculation à court terme avec effet de levier plutôt que sur la détention à long terme. Bien que cela puisse augmenter la volatilité, cela ne remet pas en question les fondamentaux.
Des profits sans prises de bénéfices : le marché reste stable
Un autre signal clé : les données sur les profits/pertes non réalisés montrent que les profits sont largement distribués, mais personne ne se précipite pour encaisser. C'est un fort signe de stabilité du marché — des corrections brutales suivent souvent des prises de bénéfices massives par des acteurs à court terme, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Perspectives à court terme (jusqu'à fin juin) :
Haute probabilité d'atteindre 120 000 $, surtout compte tenu des entrées continues dans les ETFs et de l'absence de ventes de correction.
Une volatilité accrue est probable en raison de la domination des futures. Des replis à 105 000–107 000 $ sont possibles, mais pas critiques.
Perspectives à long terme (jusqu'à fin 2025) :
Si l'accumulation institutionnelle actuelle et la croissance mondiale de la M2 se poursuivent, la fourchette de 150 000–180 000 $ semble réaliste.
Principaux risques : régulation agressive des ETFs, décisions politiques de la Réserve fédérale, et potentielles crises de liquidité.